Soyons honnêtes ! Qui parmi les Beerunneuses n’a jamais ressenti une petite pointe d’agacement le jour où un membre de sa famille, une collègue ou une amie lui a posé cette question inquisitrice ?

           La première fois que je l’ai entendue, je venais de boucler mon premier dix kilomètres en 45 minutes et 47 secondes. Je me souviens de la fierté que j’avais éprouvée simplement pour avoir terminé ma course, car il s’agissait pour moi d’une véritable prouesse, pour ne pas dire un miracle (je sortais de plusieurs mois d’hospitalisation). Une béatitude qui s’est estompée en quelques dixièmes de secondes lorsqu’une amie à laquelle je racontais « mon exploit » m’a rétorqué : « Mais pourquoi tu cours ? Tu es déjà toute maigre ! »

            Stupeur et incompréhension ! Parce que la première des motivations pour courir est forcément de perdre du poids ? Certes, je venais d’avoir mon fils et mon ventre s’était quelque peu relâché à la manière d’un accordéon. Si j’avais été susceptible, la remarque aurait pu être des plus blessantes. Mais non, mon optique n’était pas de me lancer dans un quelconque régime à la mode, pour effacer les petits bourrelets consécutifs à ma grossesse.

              J’avais simplement le sentiment d’être en vie lorsque je chaussais mes baskets, de goûter la nature, de la humer, d’être en symbiose, de faire le vide… Le lâcher-prise ressemble-t-il à cela ? En tout cas oui, je le revendique, courir me procure un certain bien-être, du bonheur, et c’est avant tout ce que je recherche.

                D’ailleurs, pourquoi une telle question ? Faut-il nécessairement avoir une raison bien spécifique, un motif pour courir ? Demande-t-on systématiquement à l’un pourquoi il joue du piano ou à l’autre pourquoi il pratique le tennis ? La réponse est simple : non !

                  Depuis que je me suis dirigée vers le trail long, les questions ne cessent d’affluer : « Après quoi tu cours ? », « Tu es folle ? », « Où trouves-tu le temps de courir ? », « Tu fais quoi de ton fils quand tu vas aux entraînements ? »

                  Avez-vous remarqué combien ces questions peuvent être culpabilisantes, dérangeantes ? Pour pratiquer la course à pied en club et en avoir souvent parlé avec mes homologues masculins, ils ne sont jamais soumis à de tels interrogatoires. Alors est-ce lié à notre condition de femmes ? Est-on une mauvaise mère parce qu’on daigne s’octroyer quelques moments d’évasion loin de ses chérubins ? Une mauvaise employée parce qu’on court une demi-heure le matin avant de se rendre à son travail ? Certains codes semblent encore bien ancrés dans nos sociétés.

                           En ce qui me concerne, je ne réponds plus à ce type de questions et préfère prendre le contrepied : « Et toi, pourquoi tu ne cours pas ? »

                        Courir me donne des ailes, constitue un exutoire parfois à une journée difficile, me donne l’inspiration, me permet de me dépasser, de me rasséréner. Je rentre toujours dans ma ruche l’esprit léger, plus accessible, plus détendue.

                       Et vous les beerunneuses, qu’en pensez-vous ?

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