La Bee sur le gr20 devant le lac Nino
La Bee devant les pozzines du lac Nino GR20

Ah les refuges du GR20 ! Je garderai de certains un fabuleux souvenir…

Après la petite halte qui nous a permis de nous faire plaisir en mangeant melon et pastèque, nous reprenons la route avec Morgane : la journée va être longue, car nous comptons gagner le Castel de Vergio, puis Manganu.

Nous ne nous rendrons compte qu’en arrivant à Manganu de notre erreur de calcul : nous avons en effet triplé (et non doublé) l’étape !

Erreur d’inconscientes !

Il est vrai que nous n’avons pas voulu préparer ce périple comme beaucoup peuvent l’aborder. Je déteste tout ce qui est planifié, ce qui ne laisse aucune place à l’improvisation. J’aime la découverte, les imprévus.

Eh bien là, j’avoue que nous avons été gâtées du côté des surprises !

Nous aurons parcouru pour cette même journée plus de 35 kilomètres sur le GR20, dans les montagnes corses !

Mais revenons à notre arrêt « fruits frais » pour que vous compreniez comment cette journée s’est transformée en véritable galère…

PROMENADE BUCOLIQUE JUSQU’AU CASTEL DE VERGIO

Pancartes mentionnant les refuges du GR20
Pancartes dans les bois sur le GR20

Après cette pause restauration, le chemin est bien mieux tracé : rien à voir avec les sentiers rocailleux et escarpés de la matinée.

Nous croisons même des familles chaussées de Tropéziennes, qui viennent manger un bout sur le site.

Cela nous réconforte : si les gamines ont ce type de sandales, c’est que la partie qu’il nous reste à faire est moins périlleuse.

Ce sera effectivement le cas : adios les plaques rocheuses, les chaînes et les cheminées !

Nous cheminons à l’ombre des arbres, sur un sentier plutôt plat et agréable.

Que cela fait du bien de ne plus avoir à regarder constamment ses pieds pour éviter les racines !

Nous discutons avec entrain, mais je me sens encore assez faible.

Les randonneurs venant du Castel sont assez nombreux et nous rassurent : nous ne sommes plus très loin.

Nous arrivons effectivement peu de temps après au bord d’une route : un petit retour à la civilisation ne fait pas de mal !

Si beaucoup de randonneurs font le choix de passer une ou deux nuits dans ce bel hôtel (avec piscine et spa) pour se remettre un peu des émotions des étapes précédentes, nous ne nous arrêtons que peu de temps.

Il nous reste près de 18 kilomètres à parcourir jusqu’à Manganu, en espérant arriver avant la nuit.

Pas de temps à perdre pour faire du tourisme ou du shopping aujourd’hui !

Nous nous rechargeons en eau, prenons quelques fruits à l’épicerie et remettons courageusement nos sacs sur le dos.

UNE ASCENSION INTERMINABLE

Profil de l'étape 6 du GR20
Profil de l’étape 6 : Castel de Vergio – Manganu

Mais bien que cette courte halte m’ait fait un bien fou (je manquais d’eau tellement il avait fait chaud !), la fatigue s’est lourdement installée.

J’ai l’esprit embrumé, les jambes frêles. Je n’arrive plus à savoir si c’est la chaleur ou la fièvre qui me donne ces sensations.

Je demande avant de partir au commerçant si des orages sont annoncés : un lourd couvercle gris recouvre les massifs arpentés le matin.

« Quelle chance nous avons eue ! Je n’aurais pas aimé escalader les roches au milieu de ces nuages », dis-je à Morgane.

Je frémis à l’idée de me retrouver sur les plaques que nous avons escaladées, rendues glissantes par la pluie.

Mais rien de la sorte n’est annoncé : nous reprenons donc notre périple avec sérénité.

Les sentiers serpentent dans une jolie forêt ombragée, ce qui est plutôt agréable. Mais fatigue ou fièvre, je perds assez rapidement ma lucidité et m’écarte du sentier du GR20.

Heureusement, Morgane veille au grain ! Le tir est rapidement rectifié.

Sentiers en forêt sur le gr20

Puis commence une montée un peu moins difficile que les jours précédents, mais extrêmement longue.

Nous ratons un repère du GR20 et rencontrons Joan, un randonneur fort sympathique, qui s’est lui aussi perdu.

Après un petit retour en arrière, notre trio retrouve la trace jusqu’à Bocca San Pedru où souffle un vent assez vif. Les arbres en sont d’ailleurs témoins avec leurs formes singulières.

Nous pensons être arrivés au bout de nos peines, mais l’ascension se poursuit, interminable, jusqu’au col de la Bocca a Reta, à 1883 mètres.

Alors certes, les paysages sont magnifiques, mais la fatigue commence vraiment à poindre.

Joan décide de rester avec nous jusqu’à l’arrivée à Manganu.

Nous ne serons pas trop de trois pour nous encourager, visualiser les repères et prendre tout de même quelques photos.

Si nous sommes trop éreintés avant Manganu, nous pourrons faire un bivouac et j’avoue que la perspective d’être avec un homme, au cœur de ces montagnes corses sauvages, me rassure un peu.

UN SOMMET FÉÉRIQUE

Le lac de Nino GR20
Lac de Nino Gr20

Après quelques sentiers un peu étroits et deux trois passages périlleux, nous arrivons dans un genre de plaine verdoyante.

Des vaches paissent ça et là. Nos baskets s’enfoncent dans l’herbe tendre, procurant un léger massage à nos voûtes plantaires.

Nous apprécions ce nouveau terrain, plaisantons quant à la viande disponible en cas de bivouac.

Soudain apparaît un mirage, une féérie : le lac de Nino (lavu di Ninu).

Je crois que ce moment fera partie des plus beaux souvenirs que je garderai de mes aventures.

L’instant est figé, tellement il paraît irréel.

Imaginez, à 2000 mètres, des chevaux et des vaches paissant tranquillement près des nombreuses pozzines (tourbières planes parsemées de trous d’eau).

Vaches broutant sur les pozzines du GR20, lac de Nino

Avec le soleil qui décline peu à peu derrière les sommets, les couleurs sont juste incroyables.

Même si le temps est compté pour arriver avant la nuit, nous immortalisons comme il se doit cet endroit magique.

Coucher de soleil sur le lac Nino Gr20

Puis nous reprenons notre route sur de jolis sentiers spongieux, fort agréables. De nombreux rochers immenses jalonnent notre route.

Comme bien souvent, nous avançons espérant au détour d’un roc apercevoir le toit d’un refuge.

Mais rien n’est en vue, ce qui nous désespère.

Le chemin redescend à travers des rochers épars. Nous finissons, après avoir pesté des centaines de fois, par atteindre à la tombée de la nuit les bergeries de Vaccaghja.

L’INCROYABLE HOSPITALITÉ CORSE SUR LE GR20

La bergerie de Vacchaghja
Bergerie de Vaccaghja Gr20

Inutile de préciser que tout le monde dormait quand nous sommes arrivés.

Impossible de se faire une idée précise du refuge plongé dans la pénombre.

Les deux gardiens, fatigués par les deux services de fin de journée, nous regardent pleins d’empathie. Ils acceptent de rallumer leurs fourneaux pour improviser un repas. Nous choisissons deux tentes à l’aveugle : intérieurement, mes soupçons se confirment pour le COVID et je ne veux pas faire courir de risques supplémentaires à Morgane.

Après avoir déposé nos sacs, nous découvrons une belle planche de charcuterie corse sur la table.

Le ravito de Vacchagja GR20

Voilà qui nous redonne le moral !

Mais le meilleur reste à venir : l’un des gardiens a cuisiné des pâtes au pesto et je crois qu’elles resteront à jamais gravées dans ma mémoire.

Après une telle journée, il faut au moins ce petit plaisir !

Une vraie madeleine de Proust, ces pâtes au pesto !

Malgré l’heure tardive et le froid, nous décidons de prendre une douche : la bergerie affiche en effet la mention « eau chaude » !

Ce n’est pas un luxe après toute la poussière que nous avons avalée, sans compter la sueur collante.

Mais point de lumière à l’intérieur du petit cabanon. J’ai donc découvert ce qu’était une douche à l’aveugle, avec un filet d’eau minuscule.

Le pire, c’est que j’ai vécu ce moment comme un luxe.

La suite est évidente : 35 km sur le GR20, ça use les souliers, les muscles et le moral.

Campement et toilettes de luxe en pleine nature à Vacchagha GR20

Jamais je n’ai tant espéré me plonger dans les bras de Morphée…

La suite à venir…